« Tu es fait de cent
mille milliards de cellules.
Nous sommes, chacun,
une multitude. »
Carl
Sagan
Lundi 25 mai 2020 - Confinement jour
72
Voici le soixante-douzième
jour de ce processus de confinement et nous sommes bien vivants dans cette
situation de crise où la confiance s’est envolée.
Des nuées
s’effilochent à l’horizon au-dessus d’une mer agitée. Le Soleil se voile et les
hirondelles dansent dans le ciel. Quelques baigneurs s’aventurent sur la plage
et dans les vagues vigoureuses. Aujourd’hui, la province d’Almeria est entrée
dans la phase 2 de la « descalada » (le déconfinement à l’espagnol). Pour
résumer, la phase 2 est pareille que la phase 1 pour les gens. Quelle amélioration
!
Souvent,
j’entends dire que l’État d’Urgence Sanitaire a été mis en place pour l’intérêt
général. Mais qu’est-ce que l’intérêt général sinon l’intérêt conforme à
l’idéologie du moment et du gouvernement en place. L’intérêt général permet une
atteinte aux libertés et aux droits des personnes et ceci soi-disant pour le
bien de tous. Qu’est-ce que le bien de tous ? Si l’intérêt général atteint ma
liberté ou un de mes droits, pouvons-nous appeler cela « bien de tous » puisque
je suis exclu de ce bien général. Si l’État me prive d’une partie de mes
propriétés pour l’intérêt général, je me sens lésé, alors est-ce vraiment pour
le bien de tous puisque ma personne est lésée contre mon gré pour l’intérêt des
autres. De plus, qui me dit que tous les autres sont d’accord avec cette
privation d’une partie de mes propriétés. Alors certains me rétorqueraient,
c’est pour le bien de la majorité. Certes, mais la majorité ne correspond pas à
l’intérêt de tous, puisque la majorité représente qu’une partie de ce « tous ».
Ces derniers
temps, sous l’impulsion de l’épidémie du covid-19, les gouvernements sont pris
d’une orgie de lois, d’ordonnances, etc. sous couvert de l’État d’Urgence
Sanitaire. Mais est-ce que ces lois sont justes ? Lorsque les gouvernements
légifèrent en dehors des parlements pour être plus efficaces, n’est-ce pas une
dérive arbitraire ? Comment les gouvernements peuvent-ils être sûrs de leurs
textes de loi sans passer devant les chambres législatives, devant les juristes
et devant les institutions de contrôle démocratique ? Surtout, lorsque tous ces
textes législatifs sont effectués dans la précipitation, dans l’urgence du
moment. Depuis le début de l’épidémie du covid-19, toutes les décisions des
gouvernements ont été arbitraires sous la contrainte de l’idéologie hygiéniste
de sauver des vies. Combien de morts
pour sauver ces vies-là ? Pourquoi ces vies-là seraient plus importantes
que celles des autres ? Si la qualité de la vie devient pire, est-il justifié
de mettre les populations sous l’État d’Urgence Sanitaire ?
Je reviens à
ma question, quand savons-nous qu’une loi est juste !
D’abord, une
loi est juste lorsqu’elle n’exclut personne. En effet, la société doit être
inclusive, c’est-à-dire accepter toutes les personnes quels que soient ses
origines, la couleur de sa peau, son âge, son genre, son orientation sexuelle,
etc… en bref, toute la diversité humaine ; sinon, elle n’est plus vraiment une
société humaine. Elle devient une association humaine exclusive, un club
élitiste et elle ne peut plus être considérée comme une communauté.
Ensuite, une
loi est juste lorsqu’elle s’adresse à tous sans aucune exception. Aucun texte
législatif ne doit traiter d’un cas particulier, d’une catégorie ou d’une
tranche d’âge, etc. Chaque fois qu’un législateur a créé des lois pour des
minorités, c’est pour mieux les stigmatiser, pour les enfermer dans des
étiquettes, des cases et, finalement, cela se retourne contre ces minorités. Le
législateur doit considérer l’ensemble des personnes comme unique ; si tous
nous sommes uniques, comment pouvons-nous être placés dans des cases ou des
étiquettes. Je suis uniquement moi. Je ne suis pas un homme, parce que je ne
sais pas ce que cela veut dire être un homme pour l’autre, je le sais
uniquement pour moi. Comment un juge ou un législateur pourrait savoir ce que
représente un homme pour moi puisqu’il n’est pas moi ?
Enfin, une loi
est juste lorsqu’elle ne s’occupe pas de ce qui m’appartient en propre.
Pourquoi la loi devrait-elle normaliser les relations entre les personnes ?
Pourquoi devrait-elle décider qui peut se marier, quand, avec qui et comment ?
Pourquoi la loi devrait-elle m’assigner un sexe ? En quoi mes organes génitaux
sont-ils pertinents dans la vie en société ? Pourquoi la loi devrait-elle fixer
pour moi l’âge de ma maturité, alors qu’elle m’est personnelle et qu'elle est
différente pour chacun d’entre nous ? Pourquoi un bébé n’est-il pas un
citoyen à part entière de notre société avec tous les droits lui afférents ?
Pourquoi la société devrait-elle organiser ce qu’est une famille ? Ne
sommes-nous pas des êtres vivants libres pour organiser notre vie comme nous
l’entendons ?
Pour conclure,
une loi est juste lorsqu’elle est valable pour chacun d’entre nous, pour tous
sans exception.
Actuellement,
les lois s’accumulent, elles sont construites à la va-vite, parfois sous le
coup de l’émotion, sans réflexion, souvent pour satisfaire les besoins de
vengeances. Ces lois ne représentent rien, ni l’ensemble de la communauté, ni
la société. Prétendre que la loi doit régler tous les problèmes est un
fantasme, un fantasme de toute puissance que possèdent les politiciens. Ils
vont créer un texte législatif dans la précipitation pour calmer les
mécontents, puis finalement, ils n’auront rien réglé et les problèmes resteront
en entier jusqu’au nouveau problème suivant. A ce moment-là, les politiciens
proposeront, soit de faire une nouvelle loi, soit d’alourdir les sanctions,
sans prendre conscience que ce qui n’a pas eu d’effet une première fois n’aura
pas plus de résultat une deuxième fois.
Lorsque les
gouvernements ne respectent plus les individus comme des êtres vivants uniques
et irremplaçables, alors les États dérapent pour le pire et uniquement pour le
pire. Hélas, l’épidémie du covid-19 en est un exemple parmi d’autres.
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Premier contact
Nous avons regardé hier, pour la troisième
fois pour moi depuis sa sortie en 2016, le film « Premier contact » [Arrival] réalisé par Denis Villeneuve.
L'arrivée de mystérieux vaisseaux spatiaux
en douze lieux sur la Terre déclenche une crise internationale qui risque de
mener à une guerre mondiale. Recrutée par l'armée américaine, Louise Banks, une
brillante linguiste, tente de communiquer avec les extraterrestres. Sur une
trame qui tient en haleine, une brillante réflexion métaphorique sur notre
époque d'état d'urgence permanent se dévoile. Le parallèle avec la crise liée à
la venue du coronavirus actuel est flagrant. La folie des dirigeants va
crescendo, les peurs irraisonnées provoquent des émeutes, des pillages, des
exactions en tous genres totalement injustifiés puisque les Extra-terrestres se
montrent engageants en restant confinés dans leur vaisseau. Face à leur présence
(Heptapodes, virus) et leurs messages indéchiffrables (médias, politiciens),
les réactions dans le monde sont extrêmes et totalement démesurées. La figure
de l’autre, différente, l’altérité des Heptapodes, est rejetée et cachée par un
masque de méfiance extrême et de rejet de la part des populations.
Avec les mois qui passent, nous voyons que
les Heptapodes ne sont pas une menace pandémique pour la race humaine. Les
Hommes sont arrogants dans le sens où ils s’attendent à ce que des Aliens qui arrivent
correspondent à leurs dépendances mentales vis-à-vis de la vision de leur existence.
Ils projettent sur les extraterrestres leurs attentes humaines. La confiance
dans l’inconnu est totalement écartée, les Humains vivant de plus en plus
illusoirement dans une sécurité psychologique erronée. Tel un mantra,
l’anaphore hypnotique, répétée en boucle par les armées et les politiciens, entretient
la crise. Avant même de comprendre que le présent va influencer l’avenir de
façon irrémédiable, avant même d’appréhender les ressorts scientifiques du
virus, les dirigeants s’embarquent dans des scénarios dysfonctionnels, dans la
précipitation, qui ne font qu’empirer les choses au niveau des populations.
Induire un lien chronologique entre les Heptapodes
(ou le virus) et le déroulement des mesures de gestion de la crise
(confinement) trompe le réel dans un engrenage de panique (liberticide), obsessionnelle
et décentrée, injustifié par la réalité des faits. Les rapports conflictuels se
cristallisent autour de la venue des Heptapodes (virus), des boucs émissaires
bien opportuns pour cacher que nos sociétés sont malades. Les Heptapodes
(virus) ouvrent une porte pour l’avenir, les Humains refusent de la franchir
préférant la lier à leurs peurs et leur méfiance maladives.
Le film se montre toutefois puissamment
optimiste alors que la crise actuelle surfe sur le pessimisme. Pour que les
politiciens et tous les dirigeants en règle générale puissent élargir leur
vision du citoyen, il faudrait qu’ils se glissent dans sa peau pour être apte à
saisir son altérité. Pour prouver et contrer les intentions mauvaises des
aliens (du virus), les militaires (les politiciens) prennent fréquemment comme
référence les actions dysfonctionnelles d’une minorité d’hommes alors que celles
de la quasi-totalité de la majorité des hommes sont fonctionnelles.
Louise enlève sa combinaison et son masque
pour mieux aller à la rencontre des Heptapodes, elle prendra le risque de
respirer leur atmosphère et de s’abandonner totalement à leur volonté… et elle
est toujours vivante… Pour dialoguer, les politiciens (les militaires)
devraient briser les barrières qui nous séparent et accepter les risques que
cela comporte ; ôter leurs protections dans leur tour de Babel et faire le pari
de l’inconnu, supposer de l’altruisme chez l’autre, lui faire confiance, lui
témoigner de l’empathie, quand bien même ils n’en auraient jamais fait
l’expérience… L’épais manteau de brume qui enveloppe les ego devrait alors se
dissiper.
L’intensité et le chaos des événements dans
le film (et actuellement) sont marqués par des informations anxiogènes, souvent
invérifiées, amplifiées et exagérées, aux sources de plus en plus nombreuses,
qui provoquent la panique en prenant possession de la planète. La réaction des
populations se forme sur le contenu des médias avant toute forme de réelles connaissances.
Le caractère contagieux de la peur a la vie belle ; l’affect des dirigeants et
des citoyens se trouve dénué de rationalité. L’humanité est son propre ennemi,
elle prête aux Heptapodes (virus) des intentions uniquement imaginées et imaginaires
qui altèrent la réalité.
Quand les Humains œuvreront-ils dans la
même direction ?
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